jeudi 10 avril 2014

N'est pas Sherlock qui veut!

La bêtise contre les mangas et les jeux vidéo, chacun son moulin à vent. 

Être Sherlock Holmes n'est pas l'apanage de tout le monde!


Ah! Sherlock Holmes, le dieu de l'observation, ne cessera jamais de pousser à l'admiration lecteurs et spectateurs, mais certains devraient en rester au stade de l'admiration, de loin, dans un retrait, juste du respect.

Voilà sur quoi on tombe aujourd'hui le 10 avril 2014 -Si, si, 2014, malgré ce que la chasse aux sorcières pourrait laisser penser - dans le Midi Libre:

Une belle image, bien mise en avant avec la légende tapageuse Une lecture assidue de mangas, dont le violent “Judge”, est une des pistes étudiées. (C. F.)

Qu'il est beau cet article!

- Un joli titre: Une petite comptine à la sauce serial-killer.

Aude : "Tu tues mon frère, je tue papa, tu tues maman" à Peyriac-de-Mer


- Une belle photo: Genre on vous montre ce qu'il y a dans le ventre de la bête, plus sanglant qu'une autopsie, plus cra-cra qu'un charnier, plus dégueu' qu'un reportage sur la liposuccion; l'intérieur d'un manga! Âmes sensibles s'abstenir.

- Un contenu qui montre à quel point on a de la chance d'avoir nos Sherlock à nous en France qui peuvent déduire la cause d'un instinct meurtrier et le mobile d'une tentative de meurtre en regardant seulement le contenu du cartable des adolescentes maléfiques. 

" Les enquêteurs ont trouvé des Choco-Prince dans le cartable des enfants tueuses! Nous en déduisons que c'est à cause d'eux!"
"Parents responsables, il vous faut absolument interdire la consommation de Choco-Prince à vos enfants, sinon ils vont essayer de vous tuer!"
Bravo! Il faut applaudir cet art aussi fin que sûr et solide qui consiste à déduire des choses d'un fait somme toutes assez banal. 

Un peu de méthode


Tonton Sherlock nous apprend qu'il faut observer, pour ensuite déduire ou induire un fait et en tirer des conclusions. Et si le brillant personnage de Conan Doyle s'en sort bien, dans la vraie vie ça donne à peu près ça: 

1/ Un adolescent a tué des gens. 
2/ Comme je dois forcément trouver un élément exogène qui expliquerait un tel comportement je passe sa chambre au crible. 
3/ Cet ado, joue aux jeux vidéo/lit des mangas/ des romans/collectionne ses crottes de nez collées sous son bureau. 
4/ Il faut explorer la piste du manga diabolique dans le cas qui nous occupe

Non mais ne perd pas ton temps avec ça poulet! 

Un ado qui lit des manga ou joue au jeux vidéo, c'est normal! Comme un adolescent qui ne se projette pas dans l'avenir ou qui sait qu'il fait quelque chose de mal sans pour autant réfléchir vraiment aux conséquences, c'est un peu le truc de tous les ado. Même les scarifications, qui ne doivent pas être pour autant être prises à la légère, sont assez courantes chez les jeunes filles. C'est Ségolène qui va être contente! (1)

Dans une conférence TED Sarah-Jayne Blakemore nous explique bien pourquoi l'adolescent est un machin bizarre (2) 

Merci messieurs les journalistes! 


Ce qui m'agace le plus dans cette affaire, c'est la manière dont tout cela est traité. L'illustration de première page, l'argumentation qu'on peut résumer ainsi: 

1/ Elles ont voulu tuer 
2/ Aucune émotions chez les deux filles, elles sont folles.
3/ Elles lisaient des mangas, ça ne peut venir que de là
4/ Ces lectures les ont rendues morbides au point de se tailler les veines et s'inventer des amies imaginaires comme des sorcières ou des vampires. 
5/ Des adolescentes inconscientes (Ben tiens! C'est nouveau ça?) 

Et le but non avoué, mais qui est tout de même assez plausible, la preuve, moi-même j'y vais de mon blabla, faire peur, faire parler de soi, donner du sensas' plutôt qu'informer. 

Une toute petite phrase de m**de qui n'a pas vraiment de valeur en soi qui va guider tout un article... C'est de l'ordre de l'extraordinaire "Permis de tuer" de dame Gaillois (3)

Alors, heureusement qu'il y a des gens qui sont là pour parler de manière intelligente de la culture Jeux vidéo et manga et qui cherchent à aider les parents à comprendre comme +Yann Leroux et que tous le monde ne tombera pas dans le panneau. 

Mais il faut tout de même déplorer que les choses n'évoluent toujours pas, que nous sommes dans la même situation qu'au 17ème siècle, époque où on préconisait d'interdire la lecture des romans (4) aux jeunes-filles parce que ça allait forcément les dévergonder. 

Allez, je vous laisse tranquilles, les Loulous, lisez, jouez, et mangez des Choco-Princes! 
(Ceux qui me connaissent auront remarqué que je me suis abstenue de faire une quelconque remarque sur les flatulences et le côté nauséabond de certains propos malgré mon sous-titre. Il se pourrait que je devienne sage et/ou adulte... 

(1) Pour ceux qui n'étaient pas nés à l'époque du Club Dorothée (petit rappel du Figaro de 2012) ou qui ne s'en souviennent pas, c'est aussi un peu à Tata Sego qu'on en doit la fin. Ayant entendu la voix de Dieu, elle partit en croisade contre la violence de cette culture, et je caricature à peine. 


(3) Une autre dame partie en croisade contre ce qu'elle ne connaissait pas. On voyait dans l'article du Point en question, sous un beau bandeau d'une vielle peau dame, qui de toutes évidences cherche encore à faire jeune, une belle image de CoD apparaissait, toujours la même mise en page douteuse! 

(4) Le roman n'était pas encre à cette époque établi comme un genre légitime. 



mardi 8 avril 2014

Oui une poule, c'est con!

Au détour de G+ un petit article m'interpelle... 


Vous le savez, j'aime blablater sur tout et rien, mais surtout quand il y a des petites choses qui m'agacent. Je me lance donc dans une petite réflexion éclair - si c'est pas un bel oxymore ça! (1) Donc, comme à mon habitude, je vais chercher le sac de pierre et vous le tendre bien gentiment au cas où quelques âmes errantes viendraient se perdre là, armés de grands idéaux bardotiens (2)

Aujourd'hui, faisant un petit tour sur mon réseau social préféré, GooglePlus, je vois qu'une de mes amis partage un article pas mal du tout, il est bien écrit quand-même, et qui est agréable à lire. Donc, même si je ne suis pas d'accord avec ce qui se dit là dedans je poursuit ma lecture. Ainsi, la très sensible et remontée Hélène nous a fait un très joli article qui dénonce les pratiques inhumaines et les manipulations marketing de l'agro-alimentaire. Dans "Allô Mamie Nova" sur le blog de la ruche qui dit oui, diffusé en juillet 2013, on nous décortique les pratiques d'un marketing qui ne ment pas et qui ne fait que jouer sur les mots et on s'alarme de devoir fournir un effort pour savoir ce qu'on mange.

La bêtise humaine si elle fait vendre, c'est pas sur l'industriel qu'il faut taper en premier. 


Ouep... Ils ne mentent pas, où est le problème? Ils jouent sur la bêtise des gens qui ne réfléchissent pas plus loin que le bout de leur nez et se laissent attraper par de jolis images, est-ce nouveau? Et surtout, peut-on leur tenir rigueur de vouloir faire leur beurre? Et puis, quitte à jouer les avocats du diable, le méchant complice qui aide à la duperie en affichant sa bobine sur les boîtes, il travaille et contribue à l'économie française non?
Passons donc, tout le monde ne peut pas être d'accord avec l'idée que la bêtise humaine n'est pas une excuse pour tirer sur tout ce qui bouge, et certains doivent encore être convaincu qu'il faut continuer à infantiliser le public et ne pas tabler sur l'espoir que l'intelligence et la culture viendront sauver l'humanité.

Finalement, ce qui me chagrine d'abord là-dedans, c'est que dès qu'un marketeux a l'intelligence de faire son boulot, c'est à dire faire vendre, générer du chiffre et aussi aider un peu l'emploi, on lui tape dessus. Oui, il y a du double sens (3) dans ses propos, on les comprend comme on veut, SIIIIIIII et seulement si on ne fait pas l'effort de regarder ce qu'on achète.

Et puis des fois, c'est même pas une question de bêtise, mais de moyens. 

Au demeurant, j'ai beau préférer les œufs des poules de ma grand-mère, ben oui, elles sont nourries avec de bonnes choses, quand je vais au supermarché et que mon budget n'est pas au beau-fixe, je suis bien heureuse de pouvoir me payer des œufs pas trop chers. Les discours anti-malbouffe sont géniaux mais dans les faits, il faut bien manger parfois et de temps en temps on est bien content de remplir son frigo, fusse-t-il plein de merde, du moment que cette merde nous apporte ce dont on a besoin pour vivre. Alors je dis "pourquoi pas"? On nous culpabilise à longueur de journée parce qu'on achète de la meeeeeerde comme le disait Mr Coffe et on se retrouve face à des situations ahurissantes. Je vous plante le décors, j'étais à Carrefour au rayon des œufs. Alors que je calculais combien il m'en faudrait, une maman arrive; de celles qu'on sent qu'elles galèrent un peu, à bout, le regard inquiet qui navigue entre le caddie qui se rempli pour approvisionner le frigo et pour vider son porte-monnaie, les rayons qui alourdissent son caddie et les bambins qui l'accompagnent et videront aussi sec tout ça. Elle allait prendre une boîte parmi la moins chère quand une gentille bobo bien friquée lui asséna un beau regard inquisiteur accompagné d'un très inconvenant, mais à moitié adressé à la pauvre mère "Si c'est pas malheureux de faire manger ça à ses enfants!". Hésitante mais ne pouvant faire autrement, la petite maman aussi rouge qu'un piment d’Espelette, a quand même rangé ses œufs premier prix au-dessus d'une montagne de denrées low-cost.

Alors oui, la bonne bouffe est une étiquette éthique et tactique qu'on ne peut remettre en cause et dans l'idéal, on devrait tous manger que des bonnes choses. Mais voilà, c'est dans l'idéal, et que je sache, on ne vit pas dans le monde des idées. Et puis, le BIO est à la mode, lui aussi il nous fait du marketing un peu douteux, voire carrément amoral. Le naturel fait vendre et s'empiffre sur le dos de la crédulité des gens lui aussi. Les exemples sont légions et il suffit d'aller sur certains sites qui vous promettent une vie meilleure si vous dites Fuck à cette méchante société, ces méchants scientifiques et ses horribles industriels. Dans le top 3 des aberrations de ce genre, vous avez ceux qui vous promettent de guérir de tout en tournant le dos à la médecine +Tyrian Dunaédine pourra vous briefer comme il faut sur la chose de même que +Zoélie F. qui vous donne plein de bons conseils en Charlatologie.

Humain, trop humain, ou pas assez... 


Et pour faire bien, montrer qu'on s'intéresse à la planète, il faut systématiquement dire que c'est pas bon pour la santé mais qu'en plus c'est pas moral parce que ces pauvres poules sont traitées de manière inhumaine... IN-HU-MAINE?

Il n'y a que moi que ça choque franchement?

Cet anthropomorphisme qui conduit les défenseurs à vous obliger à répondre "non" à cette question "Aimerais-tu vivre en cage?" n'est-il pas un atour rhétorique douteux? Vous auriez idée de demander à une poule si elle a envie d'être humaine? Nul doute qu'avec les triturations cérébrales qu'on s'inflige, elle dirait non elle aussi. Perso, j'ai jamais vu une seule des poules que j'ai eu s'interroger sur les tenants et aboutissants de ses actes et de sa condition. Et dire que c'est inhumain, veut bien souvent dire dans la bouche des gens bien pensants que ce n'est pas digne de la bête, alors qu'en vérité, c'est de ce qui est digne ou non de faire pour un homme qu'il vaut mieux prendre conscience. Battre un animal par pur plaisir sadique est inhumain, mais chercher à nourrir sa famille et ses congénères est-ce que ça l'est? Dans ce cas là, on révise entièrement sa production et on laisse crever de faim la population mondiale, une grande partie meurt déjà de faim de toutes manières. Nous sommes trop nombreux sur cette belle planète, mais même surnuméraire, c'est surtout l'humain que doit servir en premier l'humanisme. Et limiter les pertes chez ses bestioles, est-ce vraiment inhumain? Eh oui, les cages sont là pour limiter les pertes, ne pas le voir c'est mal connaître la connerie du gallinacée.


Ben oui! C'est con une poule et c'est normal, on lui demande pas de faire l'ENA! 


Une poule ça bouffe ses congénères, dont elle n'a cure puisque ce n'est même pas un animal grégaire. Elle n'en a rien a battre de vivre seule, elle ne percute ses camarades de basse-cours que lorsqu'elles lui piquent son bout de gras ou lorsqu'elle veut les bouffer. Sympa le cannibalisme hein? Sérieusement, entre les foutre en cage et enlever le bec pour éviter qu'elles se bouffent entre-elles, moi je dis, il n'y a pas photo. Je pourrais vous faire un long discours sur la cervelle de ses volatiles, mais il suffit de les observer pour comprendre. Une poule c'est con, et s'il n'est pas digne de l'humain de la faire souffrir pour le plaisir, lui prêter des considérations morales c'est tout de même un peu abusé. Elles ont des émotions mais c'est assez limité tout de même et elles ne sont pas équipées pour éprouver des sentiments (4). Et en plus, on leur demande de pondre, des œufs, pas des essais, et si possible en quantité et ce n'est pas qu'une question économique. L'écologie demande une économie de la rentabilité, parce que les ressources dont on a besoin pour faire produire ses œufs ne sont pas illimitées, et chercher à limiter la matière à employer n'est pas qu'une question économique, c'est aussi écologique (5). 

Donc... 

Une poule c'est con, un publicitaire ça manipule, et un être humain ça ne cherche pas forcément la dignité là où il faut. Rien de nouveau sous le soleil! 

Allez, je vais me faire cuire un œuf moi et continuer à me demander "Why did the chicken cross road" 

@+ les gens! 

(1) Peut-on vraiment dire avoir réfléchis quand on n'a pas pris le temps. Et d'ailleurs, c'est quoi réfléchir d'abord?

(2) N'allez pas cafeter à Brigitte Bardot qu'un méchant gnome machiamélique vient baver sur les gentils namimaux!

(3) Et on me dit dans le creux de l'oreille qu'un article de +Zoélie F. vous aidera à user vous même de la phrase à double sens.

(4) Je m'appuie là sur la distinction entre sentiments et émotions que Antonio R. Damasio fait.

(5) Cela date un peu, 2004, mais dans Se libérer de la matière de Bernadette Bensaude-Vincent il y a tout un chapitre qui est consacré à l'écologie et l'économie de la matière.